Dans un monde ultra-connecté, un coiffeur à l’ancienne prouve que l’excellence et l’authenticité valent mieux que toutes les stratégies marketing.
Imaginez un salon de coiffure sans site web, sans réservation en ligne, sans terminal de paiement, et même sans numéro de téléphone à 9 chiffres ou de GSM à 10 chiffres. Un anachronisme dans notre époque digitale ?
Pourtant, quelque part en Wallonie, une petite devanture discrète dans une impasse abrite le phénomène que toute la province connaît : mon coiffeur et ses ciseaux magiques.
Le salon qui défie toutes les règles du marketing moderne
Mon coiffeur ne possède pas d’adresse e-mail professionnelle, pas de code QR, pas même un compte Instagram pour que l’on puisse admirer ses créations capillaires.
Il griffonne dans son petit carnet les prénoms de ses clients et l’heure de RDV. Les prénoms… Notez l’heure, car vous ne recevrez pas de rappel de rendez-vous par SMS !
Dans une industrie de services où l’image est reine et la présence digitale indispensable, mon coiffeur fait figure d’OVNI.
“Je n’ai jamais voulu m’embarrasser avec tout ça,” me confie-t-il en maniant ses ciseaux avec une dextérité hypnotique sur mon crâne de presque chauve. “Les réseaux sociaux, ça prend un temps fou, qu’on ne passe plus avec les clients.” Bien vu, ça.
Le décor de son salon reflète cette philosophie minimaliste : pas de magazines fashion dernier cri, pas d’écrans diffusant des défilés de mode, pas même de musique boum boum. Le lieu est épuré, deux chaises confortables, des miroirs bien éclairés, et des tiroirs contenant l’essentiel de son art : ses outils.

Le bouche-à-oreille, l’argument majeur de mon coiffeur
Comment expliquer alors que son carnet de rendez-vous soit perpétuellement plein, au point que certains clients planifient leur coupe trois mois à l’avance ?
Moi qui pensais au départ que cet artisan ne drainait qu’une clientèle locale. Absolument pas. Cette approche centrée sur l’humain plutôt que sur le marketing a créé une communauté de fidèles.
Des banquiers aux artisans, des professeurs aux artistes, tous les hommes de la ville convergent vers ces quelques mètres carrés où le temps semble s’être arrêté.
Des célébrités en quête d’authenticité
Le phénomène le plus étonnant reste toutefois la clientèle de stars qui fréquente discrètement le salon.
Contrairement aux établissements huppés qui affichent fièrement leurs clients de renom sur leurs murs (par exemple, le barbier Bayer et Bayer que j’ai fréquenté voici quelques années, à Bruxelles), mon coiffeur traite ses illustres visiteurs comme n’importe qui.
“Ce sont avant tout des amis,” sourit-il avec humilité et franchise. “Ils viennent ici précisément parce qu’ils savent que je ne vais pas prendre un selfie avec eux pour le poster partout. Ils peuvent respirer.”
Parmi ses clients célèbres, une star belge du cinéma. Ou encore José Garcia, qui parle la langue de notre vedette locale, ce dernier étant en effet espagnol, en couple avec une Hollandaise. Un fameux mélange.
L’économie de l’attention ou… de l’intention
Dans un monde dans lequel l’attention est devenue la monnaie d’échange principale des réseaux sociaux, où chaque entreprise parait désespérément chercher à capter quelques secondes de notre temps de cerveau disponible, cet artiste du peigne incarne une approche radicalement différente.
“Le paiement en cash ? C’est simplement plus simple,” explique-t-il. “Pas de commission, pas de machine qui tombe en panne, pas de relevé à vérifier le soir. Je peux me concentrer sur l’essentiel : mon métier. Ensuite, ma comptabilité est en ordre, tu peux vérifier, Philippe !”
Cette démarche résolument analogique fascine le spécialiste du marketing digital que je suis.
Et ce petit bonus tout bête : une petite boîte en bois toute belle, renfermant de délicieux bonbons. Vous en prenez un, vous laissez un pourboire, c’est magique.
La leçon de mon coiffeur pour les entrepreneurs d’aujourd’hui
À l’heure où les startups investissent des fortunes en marketing d’influence, en SEO et en publicités ciblées, le succès tranquille de ce coiffeur nous interroge : et si l’obsession du digital nous faisait perdre l’essentiel ?
“Je ne dis pas que tout le monde devrait faire comme moi,” précise-t-il avec sagesse. “Mais il faut savoir ce qu’on veut vraiment. Moi, ce que j’aime, c’est couper les cheveux et discuter avec mes clients. Tout le reste, c’est du bruit.”
Bzzzzzzz fait la tondeuse amie.
Une chose est sûre : dans un avenir toujours plus connecté, les espaces comme ce salon traditionnel, où l’humain l’emporte sur le virtuel, où l’écoute remplace les algorithmes, deviendront peut-être les véritables luxes de demain.
Mon coiffeur n’est pas près d’être remplacé par une IA, et n’est pas près de s’arrêter non plus. « Philippe, je suis retraité dans quelques mois, mais je continue, sais-tu. »
Après 42 ans de carrière, chapeau bas !
P.S. Comme il ne fait rien comme tout le monde, mon coiffeur est fermé… le samedi.
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